Good Night,
and Good Luck
Un film de George Clooney
Avec David Strathairn,
George Clooney, Robert Downey Jr., Patricia Clarkson,
Ray Wise, Jeff Daniels…
Good Night, and Good Luck est la seconde realisation du comédien George Clooney, qui à travers sa société de production Section Eight (qu’il dirige avec Steven Soderbergh) promeut des œuvres très variées, au contenu très libre. Un méthode de travail qui évite la censure des grandes majors, bien trop présente aujourd’hui.
Après Confessions of a Dangerous Mind (dont le premier scénario fut écrit par Charlie Kaufman), Clooney s’intéresse à l’histoire d’Ed Murrow, directeur de l’information de la chaîne CBS au début des années 50 qui affronta le sénateur McCarthy et mena à sa perte.
Cette histoire vraie, qui a marqué l’histoire du journalisme à la télévision comme celle du Watergate, est emblématique. Alors que McCarthy faisait la chasse aux sorcières dans les milieux artistiques, politiques, militaires et gouvernementaux, journalistiques, peu osaient encore s’opposer et contredire le sénateur, par peur d’être taxé de communisme.
Certains pourtant s’opposèrent à cette politique, à ses méthodes plus que contestables et liberticides. Ed Murrow et la rédaction de l’information de CBS, dont Fred Friendly, furent de ceux qui s’opposèrent à la censure et à la chasse aux sorcières pour de fausses raisons. Utilisant le cas d’un homme viré de l’Air Force sur des raisons non fondées, Murrow s’en prit directement à McCarthy à l’antenne, avec conviction et acharnement. Celui-ci utilisa son droit de réponse, mais cela ne le sauva pas, bien au contraire.
George Clooney, artiste engagé pour la démocratie, s’est intéressé à un sujet sensible et historique. Et il faut reconnaître que Good Night, and Good Luck (phrase que prononçait Ed Murrow à la fin de chacune de ses interventions) est une belle réussite.
Œuvre quasi documentaire, où de nombreuses images d’archives se fondent aux images de la fiction elle-même, Clooney signe un film important, nappé dans un magnifique noir et blanc de rigueur, où il a su mettre en avant le sujet principal du film et donner à David Strathairn un rôle d’envergure, celui de Murrow, que le comédien a interprété de formidable manière. En filmant cette histoire de liberté bafouée, le film de Clooney fait bien évidemment écho à notre monde moderne, où la censure politique et économique font rage et musèlent les médias. L’affirmation de la liberté des médias, leur intégrité et leur indépendance est toujours une question centrale de nos sociétés capitalistes. A cet égard, Good Night, and Good Luck fait écho.
La réalisation de Clooney est extrêmement soignée, à travers l’utilisation d’un noir et blanc classique mais nécessaire compte tenu du sujet et de l’intégration d’images d’archives. Photographie soignée, cadre classique sans manquer pourtant d’audace et de style (les plans de Strathairn à l’antenne sont magnifiques), Clooney le comédien s’est mis en retrait malgré son rôle important pour laisser du champ à ses comédiens, qui tous composent subtilement et avec talent. Il est plaisant de voir Robert Downey Jr. (revu également dans Kiss Kiss Bang Bang), mais également Patricia Clarkson ou encore Ray Wise. Quant à Strathairn, sa composition est tout simplement éblouissante. Imprégné de son personnage, de son phrasé et de son style, il ressemble aux héros de films noirs des années 50. Une performance remarquable, couronnée à juste titre de la Coupe Volpi du meilleur acteur à la dernière Mostra de Venise.
Baignant dans une atmosphère jazz, Good Night, and Good Luck est un film qui se suit avec beaucoup d’intérêt, tant pour son contenu que par sa forme.
Si l’Histoire ne vous intéresse que peu, alors Good Night, and Good Luck n’est pas un film pour vous. Pour les autres, courrez voir ce qui restera sans doute l’un des meilleurs films de l’année.
Arnaud Meunier
07/01/2006